La géographie du genre, également connue sous le nom de géographie féministe, constitue une branche de la géographie humaine qui considère le genre comme une clé de lecture fondamentale des espaces. Elle étudie les interactions différenciées que les femmes, les hommes, ainsi que les minorités sexuelles et de genre entretiennent avec l'espace. Ce courant, ancré dans les études féminines et les épistémologies féministes, démontre l'implication de l'espace dans la construction des identités de genre et la perpétuation des inégalités entre les sexes (Chivallon, 2003). L'émergence de cette approche résulte de la critique d'une science imprégnée d'une prétendue universalité masculine, omettant ainsi les perspectives féminines (Perrot, 1998). La distinction entre sexe, en tant qu'attribut biologique, et genre, comme construction sociale, est ici centrale (Hancock, 2002). Cette discipline, qui s'inspire de la pensée de Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient » (1949), est désormais intégrée dans les curriculums universitaires à travers le monde, y compris en Afrique.
En Afrique, la géographie du genre s'attache particulièrement à contextualiser la situation des femmes et à questionner la pertinence des théories féministes occidentales. Il s'agit d'un processus de décolonisation intellectuelle où les chercheuses africaines visent à revisiter leur sociologie, culture et histoire pour y réinscrire des réalités souvent négligées. Cette démarche est à la fois idéologique, scientifique, politique, économique, théorique et méthodologique. Elle vise à forger des outils conceptuels adaptés aux réalités africaines et à éviter les écueils d'une transposition aveugle de modèles exogènes. Ainsi, l'applicabilité des concepts féministes occidentaux est mise à l'épreuve dans des contextes sociohistoriques spécifiques, soulignant la nécessité d'une approche nuancée et culturellement sensible.
L'analyse de genre en géographie a permis de mettre en lumière la complexité des enjeux du développement, de la modernisation et du progrès technologique en Afrique. Les débats ont porté sur l'intégration des femmes dans le développement, la nature de la subordination et de l'oppression de genre, ainsi que sur les intersections avec les inégalités de classe, de nation ou de race. Ils ont également mis l'accent sur les obstacles à l'éducation et à l'emploi.
La thèse de Fatma-Zohra Bougherira Ben-Moussa : "Logique culturelle et dynamique de la performance sportive féminine en Algérie" a marqué un tournant décisif dans ma compréhension des espaces privés/publics et des obstacles à l'émancipation féminine en Algérie.
La géographie du genre en Afrique intervient dans divers domaines, du décryptage de la situation des femmes à la remise en question des concepts et méthodologies prédominants. L'enjeu est de faire entendre la voix des femmes africaines dans le discours académique et public pour valoriser leur perspective dans les études de genre.
Barthe-Deloizy, Francine, et Claire Hancock. 2005. "Introduction : le genre, constructions spatiales et culturelles." Géographie et cultures, no. 54: 3-9.
Hancock, Claire. 2002. "Genre et géographie : les apports des géographies de langue anglaise." Espace Populations Sociétés 20, no. 3: 257-264.
Perrot, Michelle. 1998. Les femmes, ou, Les silences de l’Histoire. Paris: Flammarion.