Réflexion inspirante de El Hadji Fallou Samb
Titre de la présentation : Sartre et la réhabilitation de l’image du noir africain
Pouvez-vous nous parler de votre domaine de recherche et pourquoi avez-vous choisi ce domaine en particulier ?
Mon domaine de recherche est la philosophie moderne et contemporaine. Mes préoccupations doctorales sont axées sur la problématique de l'histoire chez Sartre laquelle propose une relecture du marxisme. Et tout cela je l'articule au débat sur la pensée décoloniale. Le choix de ce domaine est motivé par deux choses : l'exclusion de l'Afrique de l'Histoire Universelle et l’idée de combattre les thèses racistes et européocentristes qui ont soutenu cette vision. Le choix de Sartre est surtout motivé par le fait qu'il a été un rare penseur blanc européen à s’être identifié à la lutte noire en proposant une sorte de contre discours par rapport à cette vision eurocentrée de l’Histoire.
Que représente le Symposium des Jeunes Chercheurs pour vous et pourquoi avez-vous décidé de postuler ? Quelles sont vos attentes par rapport à cet événement ?
Le Symposium des Jeunes Chercheur représente beaucoup pour moi. D'abord, je le perçois comme une opportunité offerte à des jeunes chercheurs que nous sommes pour nous penser, penser l'Afrique, ses problèmes, ses potentialités, son image, son devenir. Ensuite, comme la jeunesse est l'avenir d'un continent, associer cette frange de la population à ce genre de rendez-vous, c'est une façon de mieux préparer l'avenir en mettant les principaux acteurs de demain au centre. J'ai postulé pour connaître davantage de mon continent. J'ai postulé pour participer à penser l'Afrique, partager avec les autres jeunes chercheurs qui viennent des autres pays du continent et ailleurs. Ce que j'attends de ce symposium, c'est qu'au sortir de ce rendez-vous, les acteurs puissent davantage avoir une image positive de l'Afrique ainsi que de son passé, de son histoire et de son devenir. Et répandre cette nouvelle vision dans le monde sans verser dans la facilité. L’idée, c’est que ces idées puissent avoir un impact sur tous les participants et être à même d'orienter la politique, l'éducation, la santé, le sport afin que l'Afrique puisse acter sa souveraineté à tous les niveaux. J'attends que les conclusions de ce rendez puissent descendre dans les masses et informer leur penser et leur agir pour une meilleure Afrique dans un monde réconcilié avec lui-même. Je compte développer un réseau de relation avec les autres jeunes chercheurs.
Quels défis rencontrez-vous en tant que Jeune Chercheur en Afrique, aussi bien dans votre domaine spécifique que de manière générale ?
Les défis que nous rencontrons en tant que jeunes chercheurs africains sont nombreux. Le premier défi est celui de la décolonisation de nos recherches, des savoirs et de nos esprits. L'on a été façonné à partir d'une bibliothèque coloniale qui, soit place l'Europe au centre, soit exclu l'Afrique de la trajectoire du monde. Si l'on prend l'exemple de la philosophie, l'on constate avec regret que l'histoire de la philosophie occidentale est souvent prise comme l'histoire de la philosophie. Le défi sous cet angle c'est de décoloniser la géographie de la raison. Le deuxième défi est celui de nous informer des problèmes touchant notre continent avant de s'ouvrir au reste du monde. Et pour cela, il nous faut penser les problèmes de l'Afrique, ses relations avec le monde, son devenir, son passé. Ce qui demeure constant dans le champ de la recherche en Afrique, c'est que l'Afrique y est présentée très souvent comme objet vu de l'extérieur et non vu de l'intérieur. Le grand défi de la recherche en Afrique c'est de penser l'Afrique de l'intérieur et de produire une véritable bibliothèque décoloniale qui relate son histoire, sa vie, sa science loin des stéréotypes.
En quoi pensez-vous que le Symposium des Jeunes Chercheurs Africains peut contribuer à résoudre certains de ces défis ? Quelles solutions ou opportunités pensez-vous qu'il pourrait offrir aux Jeunes Chercheurs comme vous ?
Le symposium de jeunes chercheurs peut être une véritable opportunité et une véritable tribune offerte aux jeunes pour participer à soigner, redresser, repenser l'image de l'Afrique. Cette tribune peut être un véritable laboratoire de pensée pour les jeunes de pouvoir contribuer à forger de nouveaux concepts qui trouvent leur expression dans le contexte africain. Cela en s'imprégnant davantage à la production mondiale mais surtout à la production africaine. Ce symposium peut être une occasion pour les jeunes de repenser les concepts avec lesquels l'Afrique est souvent pensée et pourquoi pas proposer de nouveaux concepts, déconstruire certains concepts coloniaux. En définitive, les conclusions de ce grand rendez-vous peuvent être une contribution majeure mise à la disposition des décideurs politiques, des inspecteurs de l'éducation, des économistes pour contribuer davantage à changer la perception de l'Afrique qui est en vogue et partant contribuer à son mieux être.
Quelles sont vos perspectives pour l'avenir dans votre domaine de recherche et en tant que jeune chercheur en Afrique ?
En tant que jeune chercheur africain, je pense pouvoir d'abord contribuer à faire avancer la recherche en Afrique. Dans la mesure où ceux sont les fruits des recherches qui doivent informer la politique, la société, l'agir des citoyens, des contenus éducatifs. Ensuite, contribuer à nous décoloniser et participer à former des citoyens complètement décolonisés ayant une image positive de l'Afrique. Enfin, contribuer à élargir les initiatives théoriques et pratiques pour une meilleure Afrique connectée au monde. Car en fait le chercheur africain ne doit pas s'isoler, il doit se connecter au monde, penser les problèmes du monde et proposer des solutions globales à partir de l'Afrique, à partir des savoirs africains.
Pouvez-vous nous donner un aperçu de votre présentation lors du Symposium et expliquer pourquoi les participants devraient vous écouter ? Qu'espérez-vous transmettre ou partager avec eux ?
Ma communication est intitulée : " Sartre et la réhabilitation de l'image du noir africain". A travers cette communication, nous comptons explorer la contribution du philosophe Jean Paul-Sartre à la lutte noire et par-delà mettre en évidence son compagnonnage avec le mouvement négritude en général sa contribution à la déconstruction du privilège blanc en particulier. Nous espérons par l'entremise de la contribution de Sartre à la lutte noire montrer sa participation à la restauration de l'image du noir africain. Cette recherche nous permettra d'aboutir à deux éléments fondamentaux qui peuvent être des leviers importants pour le développement de l'Afrique. Il s’agit de l'afrioptimisme et la restauration d'une image positive de l'Afrique. Et Sartre en tant que blanc a énormément contribué à la lutte noire et contre le racisme noir. Ce qui nous amènera à le ranger du côté des précurseurs du postcolonialisme. Et là il est une véritable exception au sein des penseurs européens qui, généralement, ont appréhendé l’Afrique de l'extérieur sous la couverture des documents coloniaux.